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Le grand Hyver de 1709 ( c'est pas moi !)

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Le grand Hyver de 1709 ( c'est pas moi !) Empty Le grand Hyver de 1709 ( c'est pas moi !)

Message par CHYVER Mar 3 Mai - 13:54

Tout le monde s'inquiète du rechauffement climatique, mais celui ci aura au moins une conséquence bénéfique : le grand Hyver a peu de chances de se reproduire !Mais il eut des conséquences dramatiques : mortalité tres importante et famine !!
Les historiens annoncent 800 000 français morts entre 1709 et 1710 ( comment font ils - pas les français - les historiens, pour faire de tels dénombrements .
J'ai fait le même compte, à mon modeste niveau, en tentant de compter mes ancêtres décédés par le froid et la famine. Je posterai dès que j'aurai terminé mon analyse. En attendant, ci dessous, voici quelques anecdotes et témoignages sur cette période.

Le grand Hyver de 1709
Contexte historique

Les difficultés économiques de la France avaient déjà commencé dès 1672, mais elles culminèrent en 1709.
Plusieurs éléments entrent en ligne de compte, et d'abord l'état de guerre permanent qui avait fait augmenter les prélèvements fiscaux et ralentir considérablement l'activité économique du royaume. La France était alors engagée dans la guerre de Succession d'Espagne, entamée depuis 1701. Au cours de l'année 1708, les armées françaises commençant à s'épuiser, à bout de forces, furent repoussées de toutes parts.
Les finances du royaume étaient au plus bas, suite en partie à l'échec de la Hougue (La Hougue (ou la Hogue) est une rade au nord est du département de la Manche, près de laquelle Anne de Cotentin, comte de Tourville, combattit sous l'ordre exprès de Louis XIV malgré l'infériorité de ses cadres; il perdit glorieusement un combat contre les flottes de l'Angleterre et de la Hollande après un jour de lutte en 1692.)
A cela s'ajoutait l'émigration de quelques 300000 protestants suite à la révocation de l'édit de Nantes en 1685, départs oh combien lourds de préjudices puisqu'ils causèrent de nombreuses suppressions d'activités.
Comme si les problèmes internes et externes du royaume ne suffisaient pas, la France dut subir les caprices du temps, partageant les années 1692-1713 entre étés extrêmement pluvieux ou accablés par la sécheresse (années 1705,1706 et 1707), et des hivers tout aussi rigoureux.
Curieusement, l'hiver de 1708 fut très doux puisqu'on relevait à Paris en plein décembre 10°C ! Qui aurait alors pensé que les mois qui allaient suivre plongeraient la France dans l'horreur ? La première vague de froid eut lieu dans la nuit du 6 janvier 1709. Par bonheur, la neige l'accompagnant, les cultures et autres récoltes furent épargnées par le gel. En 24 heures cette vague de froid s'étendit sur toute la France: on releva ainsi -25°C à Paris, -17°C à Montpellier ou encore -20,5°C à Bordeaux ! La Seine gela progressivement et on raconte que la mer elle-même commençait à geler sur plusieurs kilomètres de largeur !
Le froid n'épargnait personne, et que ce fut à Versailles ou dans la plus petite chaumière de la France profonde, tout le monde grelottait.
Au château de Versailles, Louis XIV se voyait contraint d'attendre que son vin daigne bien dégeler près du feu, ce dernier se figeant rien qu'en traversant une antichambre ! Les oiseaux tombaient en plein vol, les animaux succombaient de froid au sein des étables et le prix du blé ne cessait de grimper. Il valait huit fois plus cher que l'année précédente.
Tout les végétaux se mirent à dépérir, le sol gelant sur plusieurs mètres de profondeur; les oliviers, les vignes, et autres arbres fruitiers furent perdus pour plusieurs années. Les cheminées chauffaient mal et nécessitaient un important apport de bois, de toute façon beaucoup trop cher pour la population, laissant ainsi le vent glacial s'engouffrer dans les habitations, faisant descendre la température jusqu'à -10°C. Partout en France on allumait de grands feux pour que les plus démunis puissent s'y réchauffer.
Lorsque le dégel eu lieu en avril, le constat fut épouvantable, toutes les récoltes étaient pourries. Le 23 avril, par arrêté royal, Louis XIV autorisa à re-semer chaque parcelle de terrain.
Les villes et communes taxèrent les bourgeois et les "riches" mensuellement pour pouvoir parer au plus pressé : la faim et le manque de nourriture. Tout le clergé en appela à la charité et à l'aumône. Hélas la famine se faisant ressentir, des émeutes et pillages commencèrent à avoir lieu dans tout le pays et les troupes furent envoyées dans toute la France pour empêcher les vols dans les boulangeries. Les paysans étaient contraints de se nourrir, pour les plus chanceux, de pains faits de farines d'orge et d'une sorte de soupe populaire faite de pois, de pains coupés en morceaux et de graisse... Pour les autres, ce n'était que racines et fougères.
Soucieux de retrouver le calme et de chasser le spectre de la disette, Louis XIV fit fondre sa vaisselle d'or et invita tout les courtisans à en faire autant. Les dons n'affluant pas, il eut la brillante idée de se faire communiquer les noms des donateurs, ce qui eut pour effet de mobiliser toute la noblesse. Mais le monarque ne s'arrêta pas là, puisqu'il alla même jusqu'à favoriser la piraterie. De ce fait, plusieurs dizaines de navires céréaliers accostèrent en rades de Marseille et de Toulon, ce qui arrêta en partie la propagation de la famine.
Mais l'été revenu, tous les vagabonds, paysans et autres gens sous-alimentés et affaiblis qui étaient partis sur les chemins de France pour tenter de trouver de quoi se nourrir et travailler contribuèrent à la prolifération des maladies créant ainsi de grandes épidémies de dysenteries, de fièvres typhoïdes ou encore de scorbut.
La France subira ainsi une crise démographique sans pareil puisque l'on constate qu'entre le premier janvier 1709 et le premier janvier 1711, la population diminua de 810.000 habitants sur une population globale de 22 millions de Français!
Chronologie
6 janvier : Début de la vague de froid qui touche l'Europe et particulièrement la France. C'est le début du « Grand Hiver » de 1709. La Seine gèle. Les intempéries rendent le ravitaillement de Paris impossible pendant trois mois.
13 janvier : Température record à Paris avec -23.1°C.
20 janvier : Dixième jour consécutif où la température est inférieure à -10°C à Paris. Record jamais battu. Record de -26°C à Paris. 24 000 morts de froid à Paris durant le mois de janvier.
15 mars : Début de la spectaculaire débâcle de la Seine générant une importante inondation rendant encore impossible le ravitaillement de Paris.
fin mars : Dégel après le « Grand Hiver » qui laisse plus d'un million de morts en France. Presque tous les cours d'eau français ont gelé et même l'océan Atlantique fut pris par le gel le long des côtes françaises! Nombreuses « émeutes de la faim ». Point culminant de l'impopularité de Louis XIV en France.
5 avril : Bloqué par les rigueurs de l'hiver, Paris est approvisionné pour la première fois depuis trois mois.
12 juin : Appel de Louis XIV au peuple qui est lu dans toutes les églises du royaume. L'appel est entendu et l'effort de guerre est maintenu malgré l'urgence de la disette.
20 août : Emeute de la faim à Paris. La troupe fait feu sur la foule et la ville est mise en état de siège.
Révoltes dans le Jura
Témoignages
Villefranche de Rouergue (12)
Dans les Annales de Villefranche de Rouergue d'Etienne Cabrol on trouve ces lignes : "Cette année 1709 est très remarquable par le froid extraordinaire et surprenant qu'il fit cet hiver.....il commença à se faire sentir sur les 9 à 10 heures du soir du 6 au 7 janvier et dura avec tant de force toujours en augmentant jusque au 22 du dit mois sans aucune relâche nuit et jour que le vin se gela dans la vaisselle vinaire, quoiqu'il fût bien pur et bon, même l'eau de vie glaçait d'abord qu'elle était versée dans un verre, des clefs se prirent dans le moment aux lèvres de certaines personnes dès qu'on les porta à la bouche et le 21 janvier il arriva à un homme qu'une assiette sur laquelle on avait mis du bouillon tout chaud sortant du pot pour le goûter, se prit à ses lèvres et en la retirant lui emporta la peau de dessous, quand il voulut l'ôter, à l'heure de midi, quoique la chambre où cela arriva fut bien fermée avec un bon feu. Des gens qui dormaient dans leur lit, en s'éveillant trouvaient leur bonnet collé et gelé au chevet du lit, leur haleine épaissie s'étant glacée sur le coussin. Enfin les personnes qui se tenaient auprès d'un grand feu, les portes et fenêtres bien fermées, à peine ressentaient-ils sa chaleur, et le bois sec brulait sans vigueur... La deuxième semaine de carême, le lundi, revint encore le grand froid qui se fit bien ressentir pendant 10 à 12 jours, et gela presqu'aussi fort que devant et le reste de ce carême il fit encore beaucoup de froid entremêlé de dégel, ce qui cause la démolition de plusieurs bâtiments, et des maisons entières croulèrent jusques aux fondements dans la présente Villefranche. Lors de cette première grande gelée le froid était si véhément, qu'on trouva des hommes morts sur les chemins par la rigueur de la saison, en ce même temps il arriva en la présente ville, qu'un tireur de laine fort malade, des fièvres pestilentielles, était dans une forte rêverie, se leva bon matin et sortit de sa maison tout en chemise, courant par les rues, et étant passé par la porte de Guiraudet s'en alla tout en fièvre comme un insensé jusqu'au moulin de La Bouïsse prés d'Horlhonac. Sa femme surprise de ne le trouver point au lit, le chercha partout en vain, car on l'avait arrêté à ce moulin n'en pouvant plus, et l'ayant réchauffé, on le ramena le soir chez lui, où il resta longtemps fort mal, pourtant sans mourir de cet excès, duquel il n'eut que les doigts des pieds qui lui tombèrent tout à fait. A la fin, il rétablit sa santé et vécut encore plusieurs années, gagnant sa vie du travail de ses mains, ce qui parut une chose fort étonnante et digne d'être remarquée. On allait pour lors à la chasse sans poudre ni fusil parce qu'on prenait les lièvres, les lapins, les perdrix et les autres oiseaux de plusieurs espèces sans peine à la main. Enfin ce qui endommagea le plus tous les arbres fruitiers, car les autres ne périrent point par cette rude saison hormis les plus vieux ... La meilleure partie de la récolte ayant péri, on ressema à la campagne beaucoup de menus grains soit dans les champs soit dans les vignes. Presque tous les arbres de noyer ne repoussèrent point, et c'est pour lors qu'on appréhenda de les avoir perdus sans ressource, ce qui allait être un très grand dommage. Une infinité d'arbres moururent, de sorte que la campagne fut presque sans feuillage au mois de mai et elle paraissait si triste pour l'espérance d'une bonne récolte que le blé devint extrêmement cher aussi bien que le vin. Ce fut enfin une chéreté horrible que les vivres et une misère générale dans tout le royaume de France dont toute l'Europe se ressentit aussi et qui se plaignit d'un froid si extraordinaire"
Cabrières (34)
A Cabrières l'hiver fut si rude et la gelée si extraordinaire que le vin se gelait dans les tonneaux. Les arbres et surtout les oliviers avec les figuiers moururent jusqu'à la racine et tous les blés et autres semences des champs, de sorte que l'on fut obligé de semer jusqu'à 2 ou 3 fois. La gelée ayant duré jusqu'au mois de mars la paumelle d'orge valait jusqu'à 9 livres et plus.
Castanet (81)
Extrait du registre de l'église paroissiale de Castanet: En Albigeois le septième de janvier, l'hiver commença rudement, il fit quantité de neige jusqu'au vingt février, les arbres furent pendant plusieurs jours couverts de glaçons, ce qu'on appelle vulgairement le givre, et le froid fut si rude qu'on ne se souvenait plus d'en avoir vu de semblable. Le vin glaçait dans les caves et faisait fendre les barriques, le pain se gelait en quelque endroit que ce fut et jusqu'au 25 février. Les noyers périrent entièrement, plusieurs chênes et quantité de pruniers et autres arbres fruitiers se séchèrent, ce qui causa une si grande disette qu'on fut obligé à Albi de tenir le blé à 14 livres le setier et d'en empêcher la sortie, les mois de mai, juin, juillet et août. Il vint jusques audit temps à 20 livres le setier et on obligea, par ordre de Sa Majesté, de faire le dénombrement des grains que chaque particulier avait audit an, à la récolte qui fut le 16 d'août. Le blé valait à Albi 24 livres le setier, le seigle 18 livres, les fèves autant, ce qui dura jusqu'aux semailles. Est remarquer qu'au mois d'octobre, audit an, la rivière du Tarn inonda si fortement que l'eau montait jusque près la porte de l'église de la Madeleine, ce qui causa beaucoup de dommage: elle emporta les toits des moulins d'Albi jusqu'à Gaillac, elle passait sur le chemin d'Albi à Cordes et inondait partie de la plaine qui est le long du dit chemin, en sorte que pour aller d'Albi à Cordes il fallait prendre le chemin d'Albi à Mailhoc, et l'eau abatit plusieurs maisons du côté des Avalats. Cette inondation donna de la crainte à toute la ville d'Albi qui fit une procession générale pour prier Dieu de vouloir apaiser cette inondation.
Nord de la France (59)
L'hiver fut long et le froid si pénétrant que de temps immémorial on n'en avait point vu de pareil. Il commença le jour de l'épiphanie le 6 janvier et durant 17 jours, le vent est si fort et le froid qu'à peine on pouvait demeurer dehors, un grand nombre de personnes furent incommodées, les uns ayant une partie des pieds et d'autres les doigts des mains gelés, particulièrement chez les marchands qui étaient obligés d'aller par les chemins, ou l'on trouva en beaucoup d'endroits des personnes mortes du froid. Les arbres des campagnes souffrirent beaucoup, la grande partie des chênes, même les plus gros, se fendirent de haut en bas, se faisait entendre de fort loin dans les bois, la moitié des arbres fruitiers périt, toute la nature fut entièrement gelée. Les sangliers et les loups ne purent s'en garantir, il en mourut beaucoup. Les suites furent funestes car au dégel, presque tout le monde se trouva attaqué d'un rhume qui commençait par un débord dans la tête avec de grandes douleurs et ensuite, tombait sur la poitrine souvent avec une douleur de côté et cette maladie fut générale.
Saisy (71)
Jean Thonnard curé de Saisy et chapelain de la chapelle Notre Dame
Ceux qui liront les registres seront sans doute surpris de voir une si grande mortalité mais ils le seront encore d'avantage d'en apprendre les funestes causes, c'est ce qui m'a fait prendre la résolution d'en laisser quelque chose à la postérité, de remplir le cahier qui serait trop petit pour comprendre l'abrégé qu'on pourrait lire de tant de malheurs dont nous avons été les témoins, on ne peut penser à tant de maux qu'avec une extrême et le seul souvenir fait horreur, on a raison de dire que les siècles ont des fins et des commencements bien fâcheux ou plutôt disons que la divine Bonté lassée des péchés des hommes a voulu les punir en ce temps.
Il faudrait commencer par dire que Dieu semblait vouloir avertir les hommes depuis plusieurs années par une stérilité très grande, les terres ne produisant presque rien par des révolutions des saisons extraordinaires plusieurs années se sont passées sans hiver ou s'il faisait (...) au mois d'avril et de mai, on a vu les 29 et 30 mai les blés en fleurs tout perdu par une neige qui causant le froid fit geler les dits blés, de sorte qu'on recueillait par endroit les semences, et en d'autres rien du tout, on ne prenait même pas la peine de vouloir moissonner la paille qui restait et pourrissait sur la terre, on a vu une autre année des vents furieux s'élevant et soufflant avec tant de véhémence qu'ils renversaient beaucoup de maison et dévastèrent en cette paroisse plus de 2000 pieds d'arbres, les pluies ont été si abondantes, les orages si effroyables qu'il semblait que Dieu voulait encore punir le monde par un second déluge. Les maisons renversées, des villages entiers engloutis par les eaux, les rivières près de la Loire prendre d'autres cours, une infinité de personnes noyées, les prairies abîmées et couvertes de boue et quantités d'autres effets funestes qu'il me serait trop long de rapporter ont été les causes de tant de maux que nous n'avons vécu qu'avec frayeur.
Depuis 1692, les temps ont été si déréglés qu'on n'aurait peine à remarquer les saisons, il semblait que l'hiver était confondu dans l'été on ressentait alors des froidures presque au milieu de l'été et des chaleurs en hiver, de si grands dérèglements dans les saisons causaient la stérilité de la terre et des maladies dangereuses aux hommes et ce qui est surprenant, c'est qu'on en aie trouvé plusieurs qui par des chaleurs soudaines et par certains coups de soleil trop violents ont été étouffés dans un instant. La nature si dérangée a produit chaque année des maladies extraordinaires qui ont souvent étourdi les médecins, des fièvres pestilentielles, du flux de sang, du pourpre porté de ville en ville par une certaine infection de l'air ont fait des ravages terribles, on remarque qu'à Paris en une année étaient morts plus de 100 000 personnes , plus de 32 000 à Lyon, plus de 4 000 ou 5 000 personnes à Dijon et autant par rapport dans les autres villes, on n'osait plus sonner les cloches pour les défunts de peur d'effrayer le reste du peuple déjà assez consterné. Et l'on a observé que les airs empestés allaient volant de ville en ville, les unes après les autres, le mal commençait toujours du côté de la Saône et surtout à Mâcon et à Chalon.
Voilà ce qui est arrivé depuis environ 18 ans et quoique ces maux fussent grands il y avait relâche, et on avait de quoi se soulager. Mais en cette malheureuse année de 1709 toute sorte de maux sont venus en même temps punir les hommes on ne peut penser à cette année de misère qu'avec horreur, tonnerre et vent, une guerre déclarée depuis plus 20 ans toute l'Europe en feu, toute l'Europe contre la France, des batailles effroyables, des provinces ravagées, des taxes, des subsides, des impôts et des vexations horribles avaient déjà mis le peuple dans une disette d'argent extrême, les provisions des années passées qui étaient stériles très petites, une guerre sanglante qui dévore tout est la source de la peste et de la famine que nous endurons, fléaux terribles de Dieu qui nous châtient et voici en peu de mots la source de cette famine.
L'année 1709, le six janvier à deux heures de l'après-midi le soleil était opposé à la terre, il s'éleva une bise si forte et apporta un froid si cinglant qu'il était en son dernier degré et jamais il ne s'est peut être fait une froidure plus rigoureuse qui dura jusqu'au mois de mars. La terre était couverte de neige et les blés auraient été conservés si elle eu toujours tenue mais le jour elle fondait et la nuit le temps s'éclaircissant il gelait plus fort qu'auparavant et toujours en augmentant et cela à 3 ou 4 reprises de sorte que n'ayant plus de neige sur la terre qui puisse conserver les blés et la gelée se fortifiant toujours devait enlever de terre ou déraciner enfin les dits blés, des campagnes auparavant couvertes de verdure ne paraissant plus que terre stérile sur qui on ne pouvait trouver un brin de blé et la plupart étonnée de ce spectacle allait dans les champs creuser et fouir la terre pour voir s'il ne trouvait pas encore le germe mais inutilement, les pauvres gens faisaient courir le bruit que les blés restaient encore épargnés, mais leur espérance fut vaine, tout a été perdu, excepté, quelques petits cantons qu’on avait fait dans les bois, qui furent conservés par la neige qui ne fondait pas sitôt dans les endroits couverts et sauvages. Le peuple donc, tout consterné, hors d'espérance de récolte, sans provision, était déjà en alarme et en émotion, on ne pouvait sortir du blé des villes qu'en danger de perdre et le blé et la vie, à combien cela est-il arrivé. Le blé monta aussitôt à un prix excessif et ceux même qui en avaient ne voulaient pas en vendre et le cachaient dans les cheminées qu'ils faisaient murer ; on vendit le dit grain jusqu'à 14 francs le froment, 12 livres le seigle, 6 livres l'orge et 4 francs l'avoine quelques chers qu'ils furent, personne ne voulaient vendre dans les marchés, on se l'arrachait des mains et chacun en voulait avoir pour son argent, les plus forts l'enlevaient et les plus faibles étaient malheureusement foulés aux pieds avec leur argent en mains, il se faisait des éditions et des tumultes terribles.
Les pauvres gens qui n'avaient ni blé ni argent avaient déjà pris la résolution de voler et les chemins qui en étaient couverts donnaient une si grande épouvante que personne n'osait se mettre en campagne pour faire voyage, on insultait et on attaquait partout même jusqu'au maisons de la campagne ceux qui n'avaient point de provisions, comme les seigneurs, ne pouvaient en chercher, ni se mettre sur les chemins qu'en assemblant de grosses troupes d'hommes armés et souvent risquaient une mort car plusieurs villages assemblés et biens armés de toute pièce même jusqu'aux femmes ce qui faisait plus de peine en ont souvent arrêté et partageaient le dit grain entre eux impunément pour éviter de périr de faim, les pauvres n'ayant ni grain ni argent défendaient leur malheureuse vie de toute manière, les riches avec leur argent n'avaient pas plus d'espérance, puisque personne ne voulait vendre en ces tristes et fâcheuses circonstances, tout le monde pour défendre sa malheureuse vie se faisaient la guerre, il n'y avait que les faibles pressés par la faim et qui courraient partout pour échapper à la mort qui enfin étaient arrêtés par cette cruelle qui les terrassaient et en faisait de tristes exemples, on a trouvé dans les bois proches des buissons et dans les campagnes et sur tous les chemins, les uns à demi morts, d'autres déjà expirés et quelques uns languissant et si pressés de la faim qu'ils ne pouvaient faire un pas, nous en avons une quantité en cette paroisse et un grand nombre de nos paroissiens ayant quitté les lieux pour aller chercher sa vie dans un pays plus abondant et moins stérile ont finit leur malheureuse vie de la même manière que les autres, dans un pays où ils s'imaginaient la prolonger et nous comptons près de 200 en cette paroisse que la famine a enlevé de cette vie, tant en ce lieu qu'ailleurs, plusieurs ont été trouvé du côté de Chalon et de Beaune déjà expirés sur les grands chemins, c' est voir une chose pitoyable que de voir toute sorte de personne dans les prairies cherchant des herbes et pâturant comme des bêtes, leur visage décharné, pâle, livide, noir et abattu, leur corps chancelant semblable à des squelettes faisait peur aux plus résolus, tandis que ces malheureux combattaient leur vie d'une si fâcheuse manière, les bourgeois et habitants des villes avec la force de maintes armées sortaient des villes en bataillons et allaient assiéger les maisons de campagne où il se servaient du grain, ils (...) des greniers d'abondance qu'ils emplirent de blé qu'ils verraient enlever par force dans les villages, ils étaient souvent plus de 200 où 300 hommes armés, on faisait des espèces de siège dans les maisons qui étaient capables de résister et il y eut même du côté d'Autun 2 où 3 hommes tués, le grenier de cette ville fut bientôt rempli de 14000 où 15000 mesures de blés, toutes les villes de la province en firent de même, mais Dieu les punit car le grain qu'on croyait monter jusqu'à la somme de 20 livres devint en 5 ou 6 mois à 5 ou 6 livres, il n'y eu que pour la semence du mois de septembre et d'octobre que le froment se vendait encore 10 livres, et le seigle nouveau 8 livres.
Cependant on faisait des processions de tous les endroits du diocèse, qui venaient à St. Lazard pour implorer la miséricorde de Dieu pour son peuple, il y avait tous les jours un peuple infini et il en venait de 20 à 25 lieues de la ville épiscopale on ne pouvait voir les processions sans être vivement touché, on était dans une consternation étrange, le pain qui était très cher était si rare qu'on n'en pouvait avoir, le boulanger ne voulait pas le faire, le pain d'avoine s'est vendu jusqu'à 3 soles la livre et dans le Charolais et le Morvan la plupart ne vivait que du pain de fougère.
Dieu enfin touché par tant de maux qui demanderaient des livres entiers ne peuvent être exprimé dans un petit abrégé Dieu apaisa sa colère et on sema tant de trémois qu'il y en eu suffisamment pour l'année. L'année suivante le bon grain ne se vendit plus que 3 livres, les habitants des villes furent punis de leur violence par une abondance imprévue et les usures de leur vénalité.
Tout revenant à bon prix, Dieu nous préserve.
La famine en Vendée (85)
Cette année était une des plus mauvaises Années qui soit passée depuis plus de trois siècles. Ce qui parait par des arbres qui ont péri par la Rigueur de l'hiver qui existaient depuis plus de Trois cent ans comme les piniers, les chataigners, les noyers, les chênes, les buis et autres. La gelée n'a pas seulement attaquée les arbres les plus forts et les plus vigoureux, elle a encore fait périr les blés et geler les vignes, il n'y a presque point eu de métine dans ces pays ici et il ne s'est pas recueilli un raisin dans les plaines le peu de blé qui soit resté après la gelée, n'est venu à maturité qu'à la fin du mois d'août, et il y en eu dans les champs au mois d'octobre et on n'à pu le battre qu'au mois de novembre tant l'été a été pluvieux, le prix du froment a été de quatre cent livres le tonneau, le seigle de trois cent livres, lausine de quarante et cinquante écus mais ce qui passe l'imagination c'est que le blé noir, méchant grain a valu comme le froment une pistole le boisseaux. Le vin de nos plaines s'est vendu deux cent livres le tonneau jamais la misère et la désolation n'a été si grande parmi les peuples l'état des pauvres n'a jamais été si déplorable n'y ayant presque personne en état de les assister par la rareté et du blé et de l'argent. Le commerce étant ruiné depuis plus de dix ans, joignez à tout ceci une guerre cruelle qui ravage l'état depuis plus de vingt ans tout l'Europe armée et réunie contre la France. Si jamais il arrivait rien de semblable dans la suite a ce qu'a dieu ne plaise, il faudrait ressemer surtout du seigle, de lausine , de l'orge et de la baillarge aussitôt après les gelées, ceux qui ont ressemé ont parfaitement bien réussi, il y en a qui ont labouré tout de nouveau et ensemencé les terres tout comme ils auraient fait à la St Michel et d'autres se sont contentés de grater les sillons et de jeter du grain où il en manquait. Les uns et les autres en ont recuilli en abondance. Mais peu de gens se sont avisé de ressemer en ce canton aussitôt après les gelées, ils ont cru se dédommager par le mil et le blé noir qu'ils ont semés au mois de mai ce qui n'a point réussi en beaucoup d'endroits ou du moins le temps a été si mauvais lorsqu'il fallait recueillir ces sortes de grains qu'on a été trompé dans l'espérance qu'on avait d'en avoir une grande quantité.
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Le grand Hyver de 1709 ( c'est pas moi !) Empty Re: Le grand Hyver de 1709 ( c'est pas moi !)

Message par Le Nain Mar 3 Mai - 15:40

Winter is coming !

Voici un petit tableau avec les aléas climatiques de 1500 à 1848.

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Le grand Hyver de 1709 ( c'est pas moi !) Empty Re: Le grand Hyver de 1709 ( c'est pas moi !)

Message par PAT13 Mar 3 Mai - 18:08

Merci CHYVER pour cette page de l'histoire fort intéressante.
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